Lysandre, prisonnier de son amour pour Rosaline et du poids des responsabilités imposées par un royaume en ruine, considéra la gemme sacrée, fait d'une matière précieuse qu'il ne reconnaissait pas mais dont la légende chantait les louanges depuis des siècles. C'était l'objet qui lui redonnerait sa liberté, l’objet qui apaiserait la guerre et unifierait les royaumes. Mais c'était également l'objet qui le séparerait de Rosaline à jamais. Le coeur du soldat battait la chamade alors qu'une idée sournoisement amusante lui traversait l'esprit. Il glissa sa main dans la poche de son gilet en peau de loup, extrayant une patate brune et bosselée de sa ration. Avec une grimace de malice, il jeta un regard à la gemme sacrée, puis à la patate. 'Et pourquoi pas ?', pensa-t-il. Être sérieux en toute circonstance n'était pas sa nature. Il avait toujours eu un penchant pour l'absurde qui lui donnait, d'après lui, un charme irrésistible. Avec une habileté née de la combativité et une rapidité presque féline, Lysandre échangea la gemme sacrée précieuse avec la patate ordinaire dans une parodie digne des plus grandes farces théâtrales. Il recula pour admirer son oeuvre. À la lumière tremblante de la torche, la patate avait l'air presque royale sur le piédestal dédié à la gemme sacrée. Dans le silence du souterrain, un rire étouffé résonna, puis se transforma en un gloussement incontrôlable. 'Qu'il en soit ainsi !', murmura-t-il entre deux rires.