L'été finissait alors dans la grâce rougeoyante des prémices de l'automne. Le soleil, déclinant lentement vers l'horizon, parsemait les rues pavées de Londres de reflets d'ocres et de cuivres. Elisabeth, dans une robe d'un vert feuillage chatoyant, entreprit de dire au revoir à la ville qui avait vu naître et grandir ses ancêtres. Les rues bondées de passants, son parfum d'une ville encouragée par l'antique roue des industries, ses bâtiments qui rappelaient une vie de commodité, d'élégance, avec la contrainte de bienséances. Elle se promit de chérir ces souvenirs qui devenaient maintenant les chants funèbres d'une fin de vie qu'elle avait volontairement signé. Son dernier repas en tant que fille du bon Vicomte d'Yorkshire fut d'une qualité indéniable. Chaque gorgée de vin rosé, chaque bouchée de pain chaud et fondant, les tendres morceaux de viande semblable à fer fondant sur la langue, chaque tiraillement de l'argent chatoyant sur la belle porcelaine blanche, tout était une mélodie des adieux. La soirée tomba, les lueurs du crépuscule tintèrent à l'horizon, transformant les fenêtres de leur manoir en morceaux de jade foncé scintillant dans le noir. Il était minuit lorsque Ezra apparut, spectre élégant des temps anciens. Il consultera de nouveau ses plans, les yeux sombres étincelant de détermination tandis que les bien-aimés font leurs derniers préparatifs pour voyager à travers le temps. Les minutes semblaient une éternité alors qu'Ezra se chargeait de chaque détail avec une concentration chirurgicale. Ses manuels éparpillés, le bouillon de calculs complexes, les lueurs fantomatiques de son mystérieux portail déchirant les limites du sensible, tout suggérait un voyage imminent. Préparée à l'avance, Elisabth revêt un costume de voyage du futur que Ezra lui avait fourni. Fait de tissus doux tactilement lisse, presque cellulaire dans sa maille compacte. Couleur de l'obsidienne, il se moule élégamment à son corps svelte et dégage une impression de solidité et de fonctionnalité. Avec une dernière caresse dans la lumière tamisée de sa chambre d'enfance, elle dit adieu à son monde.