Lysandre s'approcha des gardes avec une démarche dépourvue de toute menace, comme si un poids lourd bourdonnant de marchandises reposait sur ses épaules épuisées. Ses yeux, qui étaient toujours attentifs et scrutateurs, reflétaient désormais une teinte de tristesse, une lueur d'amertume qui ne faisait que confirmer le personnage qu'il jouait. « Quesako, l'ami marchand ? Vous venez de loin ? », demanda le garde au moustache épaisse qui se prenommait Goran. Un soldat robuste, vêtu d'une armure d'acier abîmée par le temps, qui montrait les signes évidents d'innombrables batailles et l'usure du long service. «Oh oui, mon seigneur. Avec le conflit en cours, les routes sont devenues de plus en plus périlleuses à parcourir. Les voleurs rodent, prêts à voler ne serait-ce qu'un morceau de pain. Et pourtant, nous autres, marchands, nous nous accrochons à cette vie, faisant de notre mieux pour nourrir nos familles tout en approvisionnant les forteresses comme celle-ci avec ce dont elles ont besoin », Lysandre raconta sa fausse histoire avec une voix délibérément fatiguée, injectant un soupçon de vérité pour renforcer la tromperie. Son monologue, plein d'empathie et de persévérance, de griefs pourtant acceptés avec résignation, toucha les gardes. Ils semblaient associer ses mots à leurs propres vies, leurs yeux exprimant une compréhension silencieuse. L’exposition de ses épreuves et de son humilité avait atteint le but, gagnant la sympathie de ces hommes armés.