Nuit tombée, sous le manteau protecteur de l'obscurité, Maelis échafaude son plan. Le prince, dont le prénom est Phoebus, dort paisiblement sur une couchette de feuilles sèches. Pour une créature autrefois grenouille, il fait preuve d'une surprenante grâce. Il est beau - inhumainement beau. Une perfection lisse, sculptée par de puissants charmes magiques. Son corps illumine la pénombre, rendant presque inutiles les lumignons bleutés qui brûlent encore doucement près de lui. À ses pieds, la cape verte est posée avec soin. C'est l'objet de la convoitise de Maelis, ce qui la ramène à la triste réalité de sa quête. Avec une nervosité mordante, Maelis avance lentement, ses pieds nus à peine posés sur l'herbe fraîche. Elle voudrait arrêter, le laisser se reposer, lui dire la vérité. Mais la lueur du feu qui danse dans ses yeux quand il la regarde ... C'est la cruelle preuve qu'il a commencé à s'attacher à elle. Elle ne peut se résoudre à briser son cœur avec des mots dits à la hâte. Elle ressent cette poignante pointe au cœur mais la voie qu'elle s'est tracée est sans équivoque. Arrivée devant lui, la cape à sa portée, elle tente de calmer sa respiration agitée tout en s'agenouillant. Les fibres de la cape sont douces et veloutées, un vert si vif que Maelis ne peut s'empêcher de penser à la campagne de Belféor. Elle l'enlève avec précaution et recule, tâchant de faire le moins de bruit possible. Mais dans le silence de cette clairière isolée, même le moindre froissement semble démultiplié. Phoebus ouvre les yeux, écarquillant d'abord les paupières avant d'afficher une expression de confusion. Alors que Maelis tente de s'enfuir, un mot s'échappe de ses lèvres, son cœur battant frénétiquement dans sa poitrine. Arrivée en dehors de la clairière, Maelis s'arrête, sa respiration bruyante et sifflante, la cape blottie dans ses bras. Derrière elle, elle peut entendre Phoebus qui l'appelle, la voix tremblante. Ce cri la poursuit comme un spectre, hantant le silence de la nuit. Mais elle sait qu'elle a fait ce qu'il fallait, qu'elle a fait son choix. Pour l'amour de son peuple, elle avait trahi celui qui avait commencé à aimer.